Courir Montréal à Gatineau par les chemins de travers

Courir Montréal à Gatineau par les chemins de travers

La pandémie et le confinement ont obligé les coureurs à faire preuve de beaucoup d’imagination, les courses s’annulaient les unes après les autres, les entraînements de groupe étaient interdits, nous étions tous à la recherche de défis et de motivation. Face à ce vide abyssal dans notre calendrier de coureur à l’été 2020, une idée un peu saugrenue est apparue, celle de relier Montréal à Gatineau à la course. Heureusement, que j’ai un « buddy » de course qui est prêt à embarquer dans ce genre d’idée un peu étrange, car seul, cela aurait été difficilement réalisable.

Jour 1 : La découverte de la banlieue
Au lever du jour, nous sommes à la gare d’Ottawa, prêt à embarquer dans le train de six heures, masqué et en habit de course. Trajet tranquille, distanciation sociale oblige, les autres passagers se tenaient loin, peut-être aussi qu’ils nous trouvaient un peu étranges avec notre accoutrement. Rendus à Montréal, nous remontons la « Main » jusqu’à Laval et nous y passons tout à fait inaperçus, vive l’acceptation des différences. Avec mon partenaire, nous sommes sur l’adrénaline des premiers kilomètres, nous tenons un rythme rapide, la motivation est au plafond. Puis arrive Laval, de kilomètres et des kilomètres de bungalows. Les jambes commencent à me faire souffrir, j’ai de la difficulté à m’accrocher, je commence sérieusement à douter du réalisme du projet. Heureusement, nous arrivons au parc d’Oka, notre soutien technique vient nous rejoindre avec le sourire, je retrouve un peu, juste un peu, de motivation. 57k plus tard, nous arrivons à notre gite à OKA, je passe la majorité de la soirée à maudire le projet, pendant que mon partenaire et sa blonde boivent une bière et profitent de la piscine.

Jour 2 : À la recherche de la piste
Richard SevignyAu lever du jour 2, cela va mieux, une petite pluie fine tombe, mais je suis presque en forme. Nous débutons en marchant jusqu’au traversier, puis nous empruntons des petites routes de banlieues cossus. Le rythme est bon, cela va bien. Le parcours indique que nous devons pendre une piste multifonctionnelle à Rigaud. Nous cherchons, cherchons et cherchons, pour finalement trouver une petite pancarte qui indique que la piste n’est plus entretenue et qu’il nous faut se rendre en Ontario pour la trouver. Comme nous sommes un peu têtus, nous décidons de nous y aventure quand même, après quelques centaines de mètres, nous décidons de rebrousser chemin, car nous avons l’impression de nous enliser dans des sables mouvants. Comme promis, la piste débute en Ontario, une ancienne emprise de chemin de fer converti en piste multifonctionnelle. Une belle surface molle, un beau paysage, le bonheur jusqu’à Vankleek-Hill. Un petit 50K facile, un accueil sympa, des « Crew » et de la bière de microbrasserie, le bonheur total.

Jour 3 : Du maïs au blé-d’Inde.
Je suis un peu surpris au lever, les jambes tiennent le coup. Après une couple de kilomètres sur une route achalandée nous retrouvons notre piste qui se faufile dans les champs de blé d’inde. Émerveillé par le paysage au début, un peu moins émerveillé six heures plus tard, quand nous comme toujours dans des champs de maïs. Heureusement, il y a une motivation supplémentaire, nos deux blondes doivent nous rejoindre et nous anticipons la totale, car nous avons réservé dans un Spas ce soir, histoire de nous réconforter un peu. Comme nous sommes un peu trop rapides et que nous enfilons nos 50k en six heures, nous arrivons au SPA un peu tôt, mais aucune trace de vie à l’horizon. Après une heure d’attente, on nous ouvre la porte, ledit Spa devait être fantastique dans les années 1960, mais depuis ce temps rien n’a changé. Nous réussissons à survivre jusqu’au lendemain, le confort était limite, vive la simplicité volontaire.

Jour 4 : On rentre à la maison.
Les jambes commencent à être lourdes. Le chemine n’est pas trop difficile, on suit la piste dans le milieu des champs de maïs jusqu’à Ottawa. Cela fait des dizaines d’heures que je cours avec mon complice et, et nous continuons à être complices, il faut le faire. Même rythme, même intérêts, même vision de la vie, il faut quand même le faire. La piste est peu achalandée et à chaque personne que nous croisons, nous avons l’impression et l’espoir que c’est quelqu’un qui vient nous rejoindre, mais ce n’est qu’une impression, un mirage en fait. Finalement, un ami vient nous raccrocher, quelques détours entre les champs et les centres d’achats, nous franchissons Ottawa et à Gatineau. Un accueil inoubliable d’une bande d’amis, la complicité a fait la job, nous nous sommes rendus.

Petit bilan de parcours
Richard SevignyMontréal-Gatineau, c’est fait pour les coureurs, c’est 200k tranquilles et plus de 80k de sentier en terre battue, plat et beau, faut vraiment aimer le maïs, mais bon. La logistique est assez facile .mais, cela aurait été impossible sans le soutien technique de nos blondes qui ont réglé tous les problèmes (bagages, bouffe, etc.) et merci pour les encouragements. Il y a seulement la complicité entre deux coureurs un peu fous peut permettre ce genre d’aventure. En attendant de créer le classique annuel Montréal-Gatineau, nous prévoyons le refaire à nouveau cette année dans le sens contraire, histoire de voir le de maïs sous un autre angle, histoire de voir la vie d’un peu plus près!