Mon dernier ultramarathon ; le pas de trop.
La passion
La passion de la course est une chose bizarre. Pour ma part, comme plusieurs coureurs, j’aime à peu près tout de la course : j’aime regarder des courses, j’aime voir des vidéos de course, j’aime entendre parler de course, j’aime parler de course.
J’aime toutes les formes de course, la course sur route avec la poursuite d’un objectif précis, la course sur piste, qui est le sport dans sa version la plus pure, la course d’endurance, où la persévérance des coureurs est remarquable et la course de trail qui réunie l’aventure et de solidarité ; tant que c’est de la course, cela me passionne. En fait, quand tu peux passer des heures à regarder des gars qui tournent en rond sur une piste, c’est un peu trop intense parfois, mais bon, la passion est difficilement contrôlable.
J’aime et j’admire les coureurs et mes préférés ce sont les coureurs d’ultra-trail, quand je vois ces coureurs sautiller entre les obstacles, presque comme s’ils pouvaient voler, je suis pantois devant ce qu’ils réalisent. Pour moi, les coureurs d’ultra-trail, représentent l’image parfaite de la liberté.
Mon dernier ultra
Avec ces images idylliques de coureurs, j’ai débuté les ultras depuis quelques années, avec plus ou moins de succès, disons que ce n’est pas ce qui est le plus naturel chez-moi. Mon dernier défi était un 80K, que d’aventures en perspectives.
Départ dans un décor idyllique avec un lever de soleil sur le fleuve. Les premiers kilomètres proposent une ascension monstre, mais cela semble aller. Pendant les premières heures, le tempo semble bon, je suis même en avance sur ce que j’avais planifié, ce qui est généralement un mauvais signe dans un ultra, mais bon, je m’imagine toujours qu’aujourd’hui, c’est la vraie bonne journée.
À la suite, d’un orage, les conditions deviennent plus difficiles, c’est glissant et de plus en plus technique et comme je suis agile comme un éléphant dans un magasin de porcelaine, cela se complique. Après un plongeon en double salto dans un ruisseau, je me relève rapidement en tentant de garder un minimum de dignité devant les autres coureurs. Tout devient plus difficile, c’est chaud et humide et comme je n’ai jamais eu le réflexe de m’hydrater et cela se corse, la tête me tourne, j’en arrache, mais je m’accroche. Au 60e kilomètre, je décide d’abandonner, pour me raviser par la suite, je vais m’accrocher.
Dans les derniers kilomètres, j’ai presque l’air d’un coureur normal, c’est ardu, mais c’est le cas pour tous, mais moi, je sais que cela ne va pas. Arriver au dernier ravito, il ne me reste que 10K, l’idée d’abandon est de plus en plus présente. Le premier répondant décide de prendre mes signes vitaux, son verdict est rapide, Il faut prendre la direction de l’hôpital et cela presse, je ne remercierai jamais assez ce gars-là.
La dérape.
Les heures suivantes ont été compliquées, il y a une image qui me reste, c’est celle de moi qui fais le pont inversé sur une civière pendant de longues minutes en raison de crampes sont intenables. L’équipe complète de l’urgence qui tente de me maîtriser, dont l’urgentologue qui indique ce qu’il faut faire pour me ramener : soluté, potassium, magnésium, insuline, tout y passe, C’est dur, mais après quelles heures, ils y parviennent, je redeviens presque normal.
La ligne fine
J’aime la course, mais maintenant je sais qu’elle peut être très dure. La ligne entre tout donner dans une course et trop donner, cette ligne est très très mince, quelques pas c’est tout. Je ne connaissais pas cette ligne, maintenant je la crains. Je ne serais pas un coureur d’ultra qui sautille entre les obstacles avec aisance, mais bon, il y a plein de belles courses sur route qui reviennent, il devrait y avoir encore plein de bonheur à aller chercher de ce côté.