Quelles est la chaussure carbone la plus rapides du marché ?

Quelles est la chaussure carbone la plus rapides du marché ?

 

Runwise

Les coureurs se demandent fréquemment si les chaussures carbone valent le coup, et combien elles peuvent nous faire gagner en termes de performance.

Clairement, les études à ce sujet sont de plus en plus fréquentes et ce n’est que le début.

Aujourd’hui, je vous parle d’une étude très récente (pas encore approuvé par les pairs et non publié dans une revue officielle).

Les chercheurs de Stephen F. Austin State University (USA) ont comparé l’économie de course de 7 chaussures carbone et 1 chaussure traditionnelle.

L’étude en question : https://scholarworks.sfasu.edu/kinesiology/33/

Un protocole simple et efficace : les chaussures ont été testées sur 12 coureurs (record au 5 km à 16 min ± 0,7 min), en séquence aléatoire sur des 8×5 minutes à 16kmh (la norme pour mesurer l’économie de course).

Voici la très bonne infographie de Courir Intelligent qui a tout résumé :
infographie de Courir Intelligent

Le classement :
1. Nike-Alphafly (3%)
2. Nike-Vaporfly2 (2.7%)
3. Asics-Metaspeed Sky (2.5%)
4. Saucony-Endorphin Pro (1.5%)
5. New Balance-RC (1.4%)
6. Brooks-Hyperion Elite2 (0.5%)
7. Hoka-RocketX (0.1%)
8. Asics-Hyperspeed (0%)

Caractéristiques des chaussures :
Caractéristiques des chaussures

Que retenir ?

Clairement, les chaussures rapides disponibles sur le marché ne sont pas égales et certaines très couteuses ne semblent pas offrir un avantage significatif.

Vous voulez investir dans une paire rapide ? Basez votre choix sur les résultats d’études indépendantes comme celle-ci.

Combien pourriez-vous gagner en termes de performance ?

Les auteurs stipulent qu’une amélioration de 3% de l’économie de course devrait améliorer les performances d’environ 3% à 14 km/h et d’environ 2,6 % à 20 km/h. Cela se traduirait théoriquement par environ 25 à 30 secondes pour un coureur de 5 km de 15 à 17 minutes et environ 4 à 6 minutes pour un coureur de marathon de 2,5 à 3,5 heures.

Je suis quand même sceptique face à ces propos.

D’une part, parce que les records du monde ont certes évolué, mais pas dans cette ampleur. D’autre part, parce que la corrélation entre performance et économie de course se situerait entre .76 et .90 selon cette étude : https://doi.org/10.1080/02640419008732129

En d’autres mots, 1% d’économie de course équivaudrait plutôt à 0.57% à 0.81% d’augmentation de la performance (il faudrait confirmer avec un expert du sujet …).

Les coureurs sont-ils égaux face aux gains de performances ?

Dans cette étude, 4 coureurs ont moins bénéficié des avantages de la Nike Alphafly. Fait intéressant : un seul participant était un non-répondeur complet (amélioration de 0%).
Les chercheurs expliquent qu’il était le seul coureur de l’étude avec une oscillation verticale de moins de 8 cm, avait une cadence plus élevée et une meilleure économie de course de façon générale.

Les chercheurs affirment que les coureurs disposant d’une moins bonne économie de course bénéficieraient davantage des chaussures carbones. Ces chaussures avantagent donc plus les amateurs que les pros !

Pour mon marathon de Valencia, mon choix est fait, ce sera les Alphafly !

Ces chaussures coutent cher alors si votre budget est limité, je vous conseille de les porter seulement lors de vos courses importantes. J’utilise mes Next% depuis 2 ans et elles sont encore en très bon état (moins de 200 km).

Bonne course !

Retraite de par le monde

Retraite de par le monde

Au début des années 80, la course à pied a connu une popularité grandissante et c’est à ce moment que j’ai débuté cette belle aventure d’être un marathonien. Mais je ne me suis jamais arrêté pour penser comment pourrait s’articuler ma retraite autour de cette passion.

À la veille de vivre cette période où l’on cesse (presque) ses activités professionnelles, je me questionne sur quel genre de retraite qui pourrait conjuguer mes deux passions soit la course à pied et les voyages. De plus en plus de coureurs planifient leurs vacances en fonction des courses qui les intéressent. Alors pourquoi pas planifier sa retraite comme, par exemple, organiser un voyage en Europe et planifier un 10 km à Lisbonne (Portugal) et 2 jours plus tard un demi-marathon à Paris (France). Et tu en profites évidemment pour visiter tous les attraits touristiques du pays.

Il existe déjà un organisme québécois qui se nomme Marathours qui organise des événements de course à pied à travers le monde. Leur calendrier pour l’année 2022 est déjà planifié dans des villes tel que Paris, Londres, Islande, Jordanie, etc. En 2016, Nathalie Rivard a écrit un livre fort intéressant, Courir autour du monde, où elle a répertorié près de 200 épreuves à travers le monde. C’est un livre abondamment illustré par de magnifiques photos et agrémenté de témoignages de coureurs.

Nos supporters naturels

Nos supporters naturels

Nos supporters naturels qui sont-ils?
Des personnes sans qui, il ne serait pas aussi stimulant voir aussi ‘’facile’’ de courir.
Ils se présentent sous la forme du conjoint (e), des enfants, des amis, des connaissances sur réseaux sociaux, de pitou etc…

Ils sont patients, dynamiques, optimistes, parfois rêveur mais avant tout ils sont présents.
Je crois que la patience doit être la plus belle qualité de ces supporters. Nous entendre parler de course jour après jour. De nos performances et de nos non-performances. Des nouvelles bébelles sorties sur le marché. D’une course qui promet un magnifique tracé, de l’absence de course que nous avons vécu durant la dernière année et demi.

Ils sont dynamiques lorsque nous leur racontons notre prochain défi, nous encourage même à s’inscrire s’il s’agit d’une course organisée. Si nous avons un doute à nous procurer ‘’le nouveau gadget’’, si le prix n’est pas déraisonnable, ils trouveront les arguments pour nous encourager à se le procurer, sachant pertinemment qu’ils en entendront parler en bien ou en mal, c’est selon 😉 durant les prochains mois.

Ils sont optimistes, souvent plus que nous en regard au défi que nous nous sommes fixés. Ils savent prendre du recul et nous exposer des faits que nous avons tendance à oublier avec l’angoisse dû au défi. Il est certain que le tout est d’autant plus probant lors d’un évènement officiel. Mais encore faut-il bien des entrainements pour se rendre à ce jour ‘’J’’.

Ils sont rêveurs… Ou devrais-je dire idéaliste. Parfois, ils ont moins conscience que nous dans ‘’quel genre de projet’’ nous venons d’embarquer. Il est plus facile pour eux qui n’ont pas à tenir un entrainement rigoureux, de voir le tout avec des lunettes roses, de façon légère. D’un revers de la main nous dire : Ben oui t’es capable !!! Et ils vont le croire… Nous, souvent on les regarde avec scepticisme. Eux ne comprennent pas pourquoi on doute de nous. Ah la la 😉

Mais ils sont définitivement présents. Le jour de la course, ils se lèveront souvent avec nous aux aurores (quand c’est possible de le faire) pour nous supporter. Nous aurons aidé à organiser ce dont nous aurons besoin, sachant qu’il est mieux de bien nous aider à nous préparer, que d’entendre nos doléances si par malheur quelque chose était porté manquant. Ils nous conduiront au départ de l’évènement…. Et nous offrirons le service de raccompagnement à la fin de la course.

Vous devinerez qu’ici, je parle beaucoup du conjoint. Avec qui nous partageons pas mal tous les éléments de notre vie, alors notre passion sera alors partagée également avec la douce moitié 😉

Mais je tiens aussi à parler de tout ceux qui sont supporters naturels au 2e degré.

Les enfants, qui soit par leur âge soit par leur manque de connaissance dans le sport, (ou leur manque d’intérêt) seront des fans incontestés. Même si pour eux, le ‘’sport’’ de façon générale suscite bien moins d’intérêt que le dernier vidéo sur Tik Tok, arriveront à mettre le tout de côté pour nous encourager et supporter à leur manière, et disons-le-nous franchement, y a-t-il quelque chose de plus précieux que nos enfants qui nous encourage?

Nos amis … amitié sincère impose, car eux-aussi seront mis à rude épreuve…. Parfois nous remettrons à notre place, de bonne façon…. Mais une bonne amitié peut être fait de toute sortes de propos. Parfois, avec le conjoint on n’ose pas tout dire, les amis seront là pour le reste 😉

Nos connaissances Facebook…. Qui jour après jour voient nos ‘’stats’’ de course souvent accompagné d’un selfie…et qui malgré le fait que la majorité d’entre eux ne pratique AUCUN sport, et qui ne se gêne pas pour nous dire que la maladie doit nous guetter pour avoir autant le besoin de bouger, seront présents aussi à leur façon. Un like, un petit commentaire qui nous fera sourire, un mot d’encouragement qui fera notre journée…

Notre pitou…. Oui oui, Fido peut aussi être un supporter…. En fait un amoureux infatigable et incontestable. Ils sont heureux de juste être avec nous, sans avoir aucune idée de ce qui se passe, ils n’en ont pas besoin, ils sont présents, agitant joyeusement de la queue. Et lorsque nous reviendront de la course, ils n’hésiteront pas à nous sauter dessus pour nous manifester leur amour, et nous? Nous serons juste heureux de leur présence et leur joie manifeste de nous revoir, peu importe la durée de l’absence, et oublierons pendant un instant la ‘’peut-être’’ douleur ressentie par l’effort et/ou la durée de l’exercice.

J’aimerais remercier sincèrement aux noms de tous les coureurs tous ces supporters. Nous les oublions souvent.

Maintenant, je ne pouvais pas ne pas vous en parler… 😊
Je suis maintenant ULTRA MARATHONIENNE …. J’ai réussi mon dernier défi en date, parcourir le trajet de l’UTCH 65km , avec son respectable 1870m de dénivelé +.

Tout s’est tellement bien déroulé. Bien géré, car durant un ultra marathon il ne s’agit pas juste d’avoir eu un bon entrainement. Il faut gérer la distance entre les ravitos. Il faut donc avoir un minimum de choses avec nous, et l’organisation de l’évènement peut demander à vérifier notre sac à tout moment. Il a en va de notre sécurité. Il faut gérer notre alimentation, connaître nos besoins en énergie, eau etc. et trainer le tout, donc on doit regarder sac d’hydratation logeable et les gadgets se doivent d’être léger.

Des bidules, avec un ultra marathon en trail mon conjoint en est témoin, j’en aurai testé. Des inquiétudes il en aura entendu. Des encouragements, il m’en aura donner tellement. Tentant tant bien que mal de me raisonner. Essayant lui aussi d’analyser mes entrainements à sa façon.

Ce fût toute une aventure, mais elle s’est tellement bien réalisée, que je remettrai ça l’an prochain. Je n’ai pas de but précis et je n’en ai pas besoin. Les derniers mois m’ont prouvé que mon corps est fort, et ma détermination l’est tout autant. Donc je continuerai de progresser dans les distances, toujours en respectant mon corps. On verra ou le tout me mènera 😊

SI tout s’est aussi bien déroulé malgré mes inquiétudes de manquer d’entrainement, je crois que c’est aussi en grande partie à l’aide de tous mes supporters naturels autour de moi.

Même mes connaissances Facebook ont su à leur façon me donner de la vitamine d’endurance en vue de cette épreuve. J’ai reçu de belles marques d’affections, d’encouragement, de messages que peu importait le résultat de m’être rendu la, était déjà énorme #marc-André. Jamais durant le 65km que j’ai parcouru en 11 :03 et des poussières je n’ai eu envie d’abandonner. J’étais toujours curieuse de voir ce que la suite me réservait. Un moral de béton. Je l’ai fait heureuse en pensant à toutes les personnes qui croyaient en moi. En fait, le veille de ma course, je m’étais résolue à arrêter de douter de moi. Je ne m’étais pas laisser le choix que de franchir la ligne d’arriver.

Et voilà que j’y suis parvenue et avec le sourire 😊
J’avais même un ami de vélo qui, dans le but de me soutenir, m’avais avisé qu’il ferait de son côté 65km de vélo seul. Donc à plusieurs reprises durant la course, je me suis demander : Alors Robert as-tu terminé toi? Ça me faisait sourire, me donnait de l’énergie.

Un autre ami lui m’avait dit; Je ferai quelques kilomètres virtuels avec toi, fais-moi signe quand tu auras besoin de moi… Réjean fût donc appelé durant la montée de la montagne noire…. Un autre coup d’énergie.
La musique dans les oreilles, une chanson me rappelle Cynthia, qui m’avait fait connaitre la chanson en question, d’un auteur que nous adorons toutes les deux, alors me voilà souriante l’imaginant apprécier la chanson de son côté.

Ma fille Arianne m’avait préparé plusieurs petites cartes avec de jolis messages à l’intérieur. Elle avait écrit sur l’enveloppe quand je devais les lire. Certaines étant réservées pour les derniers kilomètres n’avaient pas eu le choix d’être lu avant…. Me vla le nez dans le kleenex, pleine d’émotion.

Lorsque j’ai vu la pancarte du ‘’ 1 km ‘’ la distance qui me séparait de la ligne d’arrivée, j’ai pris un instant pour prendre une photo rapide et aviser en pensée tous ces supporters : Ça y est, on va réussir, celui-là vous aller tous le faire avec moi…

Et me voilà, ligne d’arrivée franchie… Mon conjoint m’avait acheté des fleurs pour l’occasion, et cela doit être un signe, 2 semaines plus tard au moment où je vous écris, elles trônent encore dans leur vase sur mon comptoir de cuisine.

J’avais une dernière enveloppe de ma fille à lire une fois arrivée, avec un cadeau. De la lecture pour ma période de récupération. Tellement de joie et d’émotions…

Non seulement j’ai enfin pu recourir une course organisée, mais j’ai repoussé mes limites dans un nouveau milieu pour moi. J’adore la communauté de coureur en trail.

Alors forcé d’admettre que la puissance (positive) des réseaux sociaux peut définitivement être bénéfique. À titre de supporters naturels virtuels, ils ont aussi leur place.

Je voulais simplement dire à tous ses supporters, conjoint, famille, amis, connaissances et amis virtuels : Un IMMENSE MERCI !!!

Et continuez d’être dans ma vie, chacun à votre façon, car dans un futur pas si loin, j’aurai encore besoin de vous 😊

Citation :
Quand le doute s’installe en toi, il te faut te rappeler que tu es toujours plus grande et plus forte que ce que tu penses.

Éboulois éboulé

Éboulois éboulé

La journée était fort belle. Le soleil de février dardait mon écran d’ordinateur de travail, m’empêchant par manque de contraste de bien y veiller – à mon travail – et renvoyait ma propre réflexion endormie. De tuque verte des Packers et de tasse de café refroidi j’étais comme chaque matin d’hiver affublé dans cette maison laissée volontairement frette, pendant que femme et fille sommeillaient sous la lourde couette. En cachette, je meublais virtuellement les mois à venir. La trame devait aboutir à un éclat : une course. La trêve avait assez duré depuis le marathon de Boston en 2019; j’avais le cœur rasséréné, donc belliqueux. Il était dès lors tout indiqué d’effacer le souvenir bostonnais par un marathon revanche en octobre, trois semaines cependant après une première salve de 65 kilomètres dans les bois. Quelques clics, la double affaire était réglée et j’étais encore en pyjama, aveuglé dans mes rayons.

De nos jours, pareille longueur (65) n’étonne plus grand monde. Les kilomètres, les milles même, atteignent et dépassent souvent la centaine, et les « ultras » (épithète pompeuse qui me rebute et m’endort tant elle court toutes les lèvres; à ce compte, ajoutez les maudits KOM et FKT*) pullulent. Franchir le cap de la soixantaine, y’a rien là, en bref. Pis : on sombre vite dans l’oubli. Un marathon – épreuve séculaire qui cristallise mieux que toute autre l’image de l’Homme se déliant franchement les jambes – happe davantage les esprits; les épreuves à trois chiffres quant à elles rendent béat. À mi-chemin entre les deux, la marche m’était interdite, la course impraticable de bout en bout. Par conséquent, je n’étais ni Hobbit, ni Jacqueline Gareau. Ni enfoui pour de bon sous les ramures et condamné à survivre sous les étoiles, ni quitte pour un carnaval de vitesse de deux heures. Ni chameau, ni jaguar, je me ferais bourrique. Ma gloire s’érigerait quelque part dans l’intermédiarité.

Les Éboulements. N’est-ce pas là le plus beau toponyme de tout le Québec? Existe-t-il plus joli siège de la poésie dans les noms de pays de la Belle Province? Le Parnasse investit la nomenclature municipale, un peu d’or émaille enfin le granit des MRC. J’irais donc, le temps d’une longue semaine, me faire fier Éboulois.

La course prenait racine dans le Parc national des Hautes Gorges-de-la-Rivière Malbaie, quelque cinquante kilomètres au nord de notre maison de vacances. Mon alarme fixait le lever à une heure farfelue : 3 h 30, mais l’était davantage l’idée d’avaler toasts et omelette au fromage — prolongement glycémique et monochrome du spaghetti de la veille — six heures plus tôt qu’à l’habitude. Un autobus scolaire attendait les participants et décollait à 4 h 30, nous nous élancerions à 6 h, entre loup et chien comme on dit (soit le début de la journée où la clarté est telle qu’on a du mal à distinguer l’un de l’autre). C’est le profil de pareille bête d’ailleurs qui ornait les affiches de l’événement (Harricana, pour ne pas le nommer).

Google Maps établissait mon heure d’arrivée à la navette à 4 h 32. Sous les étoiles, ma voiture hurlait et je faisais d’une main malhabile le tri des choses à apporter absolument dans l’autobus : une tuque, mon passeport vaccinal, une couverture de survie en aluminium, un sifflet en forme de canard dérobé à ma fille, mille gels. Vers 4 h 35, la navette m’éludait toujours, je tournais en rond sur le boulevard Kant à La Malbaie, Google Maps me répétait que l’autobus invisible me dévisageait de ses phares absents, les cieux faisaient s’abattre quelque malédiction fortuite sur ma vie. La suite appartient à l’Histoire.

À 4 h 40, un vieux prisme rectangulaire jaune bondé décollait sur la rue parallèle, et sur la banquette brune de mon enfance, les yeux fermés, j’expirais profondément. Précoce warm-up dont je me serais sacrément passé, aurais-je dit à mon voisin masqué, mais converser tenait de la dépense inutile et mes gels s’avéraient parcimonieusement comptés.

Mon dernier contact avec la réalité paisible avant l’enlisement dans l’étonnant vacarme forestier fut la loufoquerie d’un revenant. Bruno Blanchet, armé « trail » de pied en cap, l’homme qui faisait rire plus que tout autre Marc Labrèche il y a des lunes et invité d’honneur inopiné de l’Harricana, nous intimait : « Que j’en vois pas un me dépasser! » À 6 h, nous décollions, dévalant et avalant Bruno, et je ne conserverais rien de ce héros de mon adolescence au cours des prochaines heures, sinon la survivance de quelques néologismes lointains tirés de cette époque ancienne. Des mots en « âge », comme « gossage », « niaisage ». « Piochage », corrigerait un aîné.

Car la course en forêt, hors des routes, tenez-le vous pour dit, relève d’un gros leurre inavoué. L’addition course à pied et sentiers mène à plusieurs résultats, mais l’adéquation largement reçue d’avec le plaisir et le bien-être est bancale à maints égards. Ça me rappelle ce sophisme administré par l’orienteur du cégep à mon frère — garçon habile aimant les sciences et excellent pianiste — perdu face à l’avenir. L’homme satisfait, hissé hors de la multiplication des possibles, releva le menton vers le visage déconstruit d’Antoine et l’orienta à peu près : « ingénieur de son ».

1 x 1 = 1, calcul implacable qui essentialise hélas parfois l’existence.

Ainsi, les vingt premières bornes défilèrent en trombe, autour de cinq minutes le kilomètre, assez vite pour mettre en péril tous les ligaments du tarse. Le tiers de mes provisions au moins, ce sont mes yeux qui par l’exercice douloureux d’une extrême vigilance m’en délestèrent. Brûler des calories par l’intensité du regard, mon dossard d’emblée ne m’avait pas épinglé à ce fait. Les traverses boréales, comme leurs sœurs aurore, éblouissent et aveuglent à la longue. Nulle part dans l’hémisphère septentrional, les embûches sont-elles autant légion. Voyez les passerelles montagnardes pleinement dégagées de la Californie, du Colorado, foulez les GR soyeux des mondes alpestres. Aucune commune mesure. Les gagnants des grandes courses là-bas – Western States, Leadville, UTMB – courent à peu près au même rythme ou plus rapidement que les meilleures jambes québécoises de l’épreuve du 65 km, mais sur une distance tout autre (100 milles, environ 160 kilomètres) et par un dénivelé à l’avenant (à peu près cinq fois plus de verticalité montante et descendante), en altitude de surcroit.

Chez nous, au Québec, en histoire comme en course, on se déprend péniblement de nos racines.

Mais, la course, qu’en advint-il au juste en fin de compte? Les heures et les scènes se confondent; je me souviens de m’être trompé de voie à mi-parcours et d’avoir rebroussé chemin en jurant, je me rappelle de quatre édens appelés ravitaillements ralliés tant bien que mal à des moments charnières, je me revois atteindre le cap des 42 km et trouver absurde l’idée de n’en être qu’aux deux tiers, je me réjouis des huit derniers kilomètres où par écœurement j’ai fusé dans le top 10, tout à fait in extremis.

Aujourd’hui, j’écris et je guéris mon psoas droit. J’ai fait l’impasse sur le marathon du 3 octobre dernier. La qualification pour Boston remise aux calendes grecques. Ma saison de course atteint son crépuscule, la queue de poisson est quelque peu indigeste. Les feuilles tombent, les lumières déclinent, les premiers vents froids battent les rues désertes. J’essaie de prendre quelques livres, faire le plein, m’arracher de force hors de la condition de coureur-compétiteur. Cela fera son temps. À la fin, la bourrique reviendra au grand galop.

Mon 5ème marathon

Mon 5ème marathon

C’est mon 5ème marathon. Le dernier date d’octobre 2019. Je peine encore à réaliser que nous ayons dû patienter tout ce temps avant de renouer avec un 42.2 officiel. Peu importe, deux ans plus tard et près de 7 000 kilomètres d’entraînement dans les jambes, me voici sur la ligne de départ à Val-David.

Le plan est simple; parcourir 42,195KM en 2hrs45, soit 3:55/KM. Or, courir un marathon à cette vitesse est en effet simple sur papier, mais ce n’est pas facile. Il y a une différence.

L’organisation est bien rodée et le départ est donné à 8hrs00 pile. Mon ami Mathieu et moi avions déjà convenus de courir ensemble. On se permet quelques dépassements dans les premiers mètres et on fait tôt de remarquer deux gars de Sherbrooke qui courent ensemble au loin. Ils semblent bien déterminés à courir côte à côte. Arrivés à leur hauteur, Mathieu et moi leur lançons quelques mots et des encouragements. Ils nous laissent ensuite filer.

Mathieu et moi échangeons sur la beauté du paysage à plusieurs endroits. Le pace est rapide, mais la descente se fait sentir. L’effort perçue est négligeable et la température est idéale. Un coureur se joint graduellement à la conversation. Il reste quelques kilomètres avec nous et vers la marque du 12 ou 13ème il décide de ne pas suivre l’allure imposée. La suite des choses lui donnera raison parce qu’il terminera la course devant nous en 2hrs45:00:00. Je sais ce que vous vous dites, il aurait effectivement au moins pu faire un sous la barre des 2hrs45 s’il n’avait pas été aussi rigide ave les chiffres ronds. Le pauvre… 😉

Un autre coureur, Philippe, se met aussi à échanger avec nous. Je le qualifierais de coureur expérimenté. Il jouera au Yo-yo avec nous aux aléas de notre allure et des descentes sur le parcours. Sa femme l’attend au 17ème kilomètre pour lui donner sa ”boisson de mon’oncle”, selon ses dires. À ce stade, au 17ème, ma montre m’indique une allure moyenne de 3:49/km depuis le départ. C’est bien plus rapide que ce que je souhaitais. Je commence alors à jongler avec l’idée de ralentir, bien que les sensations soient encore excellentes. Je décide finalement de laisser filer Mathieu aux alentours de la demie. Il semble bien ”en jambes”, comme on dit. Je passe ainsi sur le tapis du 21.1K en 1:22:09, sur la cible. Ça va toujours et j’essaie de rester concentré sur les sensations et la forme. Philippe et moi jouons encore au Yo-yo et vers le 24ème un des coureurs de Sherbrooke revient de l’arrière et me dépasse en trombe. Cela faisait un moment que je n’avais pas regardé ma montre. Ouf! La réalité est brutale car je suis un peu au-dessus de 4:00/KM et ma moyenne affiche maintenant 3:53/KM. C’est toujours sous l’objectif, mais je sens le doute m’envahir. Philippe me dépasse aussi…pour de bon. Ouch! Je suis au 25ème et ça ne va plus.

Je réalise que je bloque à +-4:05/km et que ma concentration est fragile. Je sais que l’objectif me glisse entre les doigts. C’est la première fois que je me sens de la sorte aussi tôt dans un marathon. Je panique!

Les kilomètres défilent et je me rends compte que je ne suis pas seul dans cette situation. Un ami coureur apparaît à quelques mètres devant moi. Il marche. À sa hauteur, je le convaincs de s’accrocher un peu, mais j’entends à nouveau ses souliers qui arrêtent derrière moi. Il terminera tout de même la course en moins de 2hrs53.

Je recentre mes pensées et je me résous à terminer cette course du mieux que je peux. Ma montre affiche maintenant une moyenne de 3:56/KM après 30K. Je révise mon objectif, soit de terminer sous la barre des 4:00/KM. Malheureusement, l’essence dans le réservoir est presque à sec et je ne réussis pas à enfiler les kilomètre plus rapidement que 4:20 à 4:27/km aux alentours du 35ème kilomètre. Cet objectif sera aussi placé aux ordures. Avec si peu que 5 kilomètres à parcourir, je décide de viser tout simplement un record personnel, un P.B. comme on dit dans le milieu. Les 2hrs53:16 de 2019 ne devraient pas être trop difficiles à battre et j’essaie de terminer cette course le plus dignement possible.

Le calvaire s’achève, l’arche d’arrivée pointe le bout de son nez.

Mon chrono: 2hrs51:04.

Je reprends tranquillement mes esprits et le brouillard dans mon cerveau laisse rapidement place à de l’incompréhension. Je m’en veux, mais le sort en est jeté. C’est le résultat que j’aurai cette année.

*************

Nous sommes 4 jours plus tard. J’écris ce récit de course depuis une bonne heure maintenant. Nous sommes 4 jours plus tard et l’incompréhension est encore omniprésente chez moi. Je revois sans cesse la course dans ma tête et j’identifie çà et là les moments où j’aurais dû agir différemment. J’ai l’impression, pour la première fois, d’avoir subi un marathon plutôt que de le vivre…

D’un autre côté, j’ai aussi l’impression que le marathon m’a laissé une chance en me permettant un P.B. Je me plais à penser que c’est comme s’il voulait me prévenir que la prochaine fois que je ne respecterai pas sa distance en le défiant tôt dans la course il n’hésiterait pas à me casser en deux. J’ai payé le capital et les intérêts de mon départ ambitieux dimanche dernier, mais je n’ai pas le droit d’être fâché en ayant en poche un record personnel. Ce serait vaniteux.

Je sais une chose cependant; j’aime la course à pied, mais j’aime encore plus la distance du marathon. Je sais aussi que j’ai un rendez-vous avec cette de bête-là au printemps 2022. J’ai maintenant un compte à régler avec elle et elle vient de réveiller en moi ce désir de la remettre à sa place à la suite des durs mois d’hiver qui s’en viennent.

Repose-toi petite bête. Repose-toi bien, car dans quelques semaines reprendront les entraînements dans la noirceur et le silence du matin encore endormi. Au cœur de cette jolie ville qu’est Sherbrooke se trouvera un groupe d’irréductibles coureurs en attente d’un printemps rempli de promesses. Je serai parmi ces fous qui poussent des intervalles sur la neige et la glace en pensant à toi avec hargne. Je ne serai pas seul, oh non. À mes côtés, mes frères d’armes auront aussi en tête des objectifs qu’ils méditeront tout l’hiver.

Cher marathon,

Repose-toi.

Repose-toi bien.

Car au dégel…

Je serai prêt.