Comment utiliser l’approche sandwich pour faire progresser un coureur de façon constructive

Comment utiliser l’approche sandwich pour faire progresser un coureur de façon constructive

Runwise

Les coureurs ont un désir de progression tout à faire hors-norme. Le revers de la médaille, c’est qu’ils sont parfois trop motivés au point de commettre des erreurs menant à la blessure ou au surentrainement. Une étude que nous avons récemment menée sur plus de 700 coureurs a montré que près de 80% d’entre eux s’étaient blessé au moins une fois l’année précédente.

Pour éviter la blessure ou le surentrainement, l’entourage de l’athlète (notamment l’entraineur) doit savoir diagnostiquer les erreurs les plus pénalisantes. Mais peut-être encore plus important, il doit être capable de communiquer son message avec finesse.

Là où j’aimerais attirer votre attention, c’est qu’en tant qu’entraineur, nous faisons souvent l’erreur de transmettre directement notre solution à l’athlète en pensant qu’elle viendra naturellement résoudre son problème. Nous sous-estimons l’importance de la psychologie humaine qui consiste à trouver les bons mots. L’essentiel n’est pas la solution, mais plutôt de s’assurer que votre message a été réellement entendu et compris par l’athlète.

La technique du sandwich que je vais vous présenter permet de faire une remarque de façon à ce que l’athlète y soit réceptif sans sacrifier la relation ou effriter sa confiance.

L’approche traditionnelle
Elle se concentre surtout sur le diagnostic. Prenons l’exemple d’un coureur qui ferait ses intervalles trop vite :
« Paul, tu étais censé courir ce 1500m à 3:45/km, tu es passé 15 secondes trop vite, tu dois ralentir ».
Le problème d’une approche aussi directe, c’est que d’une part, il est peu probable que l’athlète se sente proche de son entraineur, le message a donc peu de chance d’être intégré durablement. D’autre part l’athlète ne comprend pas pourquoi son comportement est problématique, il manque une explication.

L’approche sandwich
L’idée, c’est de mettre l’athlète dans un état d’esprit optimal afin que ce dernier soit pleinement réceptif au message.
Concrètement :
1. Commencer par une rétroaction positive :
« Tu avais l’air de te faire vraiment plaisir sur cette répétition. »
2. Poursuivez avec la rétroaction constructive :
« Seulement, je suis embêté, car tu es 15 secondes plus rapide que l’allure prévue. »
3. L’explication (capitale, mais souvent oubliée)
« L’objectif de cette séance est de travailler l’allure 10k et non l’allure 5k. En courant plus vite que l’allure recommandée, les adaptations ne seront pas celles que l’on cherche, tu comprends ? »
4. Finir par une rétroaction positive : « Mais ne t’inquiète pas, on va essayer de nouveau, je sais que tu es capable de courir à l’allure prévue. ».
Maxime Lopes - L'approche sandwich

Trois avantages
1. L’athlète est plus enclin à écouter une rétroaction « négative » quand elle est précédée et suivie d’un encouragement bienveillant.
2. De cette façon, l’athlète se sent en confiance et vous écoutera. Il sera alors bien plus à l’aise de remettre en question et de ne pas reproduire l’erreur.
3. En posant une question à l’athlète, vous l’engagez dans le processus. Cela renforce l’idée que vos actions sont au service de l’athlète et non l’inverse.

Cinq éléments pour garnir votre sandwich
1. Expliquez pourquoi le comportement est problématique. Développez les conséquences négatives si l’athlète ne prend pas en compte votre remarque. Ex. : Si tu cours plus vite que l’allure prévue … alors les adaptations ne seront pas celles que l’on cherche.
2. Adoptez un ton ferme, mais bienveillant dénué d’agressivité ou de colère.
3. Posez une question pour comprendre la raison qui pousse l’athlète à commettre une erreur, notamment si cette erreur se répète encore et encore.
4. Demandez à l’athlète s’il est prêt à essayer une autre façon de faire ou de penser. Le consentement est un outil puissant pour promouvoir le changement.
5. Ne pas prendre l’erreur de l’athlète personnellement. Cela peut paraitre évident, mais il arrive parfois qu’en tant qu’entraineur, une erreur répétée chez un athlète nous irrite. Mais comprenez bien que si l’athlète continue de faire une erreur, c’est qu’il n’a pas vraiment compris d’où elle vient, et l’étendue de ses conséquences.

Un exemple de mon expérience
En tant qu’entraineur et chercheur, je sais que le sommeil est l’une des habitudes les plus payantes, mais aussi les plus difficiles à inculquer aux athlètes. En moyenne les étudiants athlètes dorment moins de 7h par nuit, ce qui a des conséquences extrêmement délétères.

Avec une approche sandwich et du dialogue, j’ai pu observer de bien meilleurs résultats pour aider les athlètes à (1) changer leurs croyances sur le sommeil (2) créer de nouvelles habitudes plus optimales.

Exemple :
– Paul : Je ne dors que 6h par nuit en ce moment.
– Maxime : Oh je vois, j’imagine que tu dois avoir beaucoup de travail, et que tu dois être stressé, est-ce la raison pour laquelle tu ne parviens pas à dormir davantage ?
– Paul : Exactement, je me sens stressé, j’ai de la misère à m’endormir, de plus je n’ai pas l’impression que le sommeil est si important non plus.
– Maxime : Bien Paul, est-ce que tu veux que je t’explique à quoi sert le sommeil chez un athlète de ton niveau ? Ensuite on pourra essayer de trouver des solutions pour améliorer cela, ok ?

Remarque finale
Les entraineurs sont souvent excellents pour faire le diagnostic de la situation. Toutefois, trouver une façon habile pour faire une remarque c’est un peu le niveau 3 du coach.

Niveau 1 : Le coach parvient à faire le diagnostic et le communiquer de façon directe (exemple : tu ne dors pas assez, tu cours trop vite, etc.)
Niveau 2 : Le coach explique le problème avec finesse, mais n’explique pas pourquoi c’est un problème.
Niveau 3 : L’entraineur explique et entoure sa remarque par des remarques bienveillantes envers l’athlète.

Les critiques ou commentaires constructifs sont importants, car ils visent l’amélioration et encouragent la correction de lacunes. Ce ne sont pas les commentaires en tant que tels qui comptent, mais la façon dont ils sont formulés. Formuler des commentaires avec subtilité adoucit la critique. Cette méthode renforce l’amélioration du comportement, ce qui garantit de meilleurs résultats pour l’athlète.
Essayez d’appliquer la méthode sandwich dans votre quotidien. Je suis convaincue que vous serez surpris des résultats.